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Bienheureuses Carmélites de Compiègne, Religieuses, Martyres. Fête le 17 Juillet.
Mercredi 17 Juillet 2024 : Fête des 16 Bienheureuses Carmélites de Compiègne, Religieuses, Martyres de la Révolution française (? 1794).
Exécution des Carmélites, vitrail de l'église Notre Dame du Mont-Carmel de Quidenham (Angleterre).
Photo de John Salmon.
http://nominis.cef.fr/contenus/saint/10003/Carmelites-de-Compiegne.html
Carmélites de Compiègne
16 Religieuses, Martyres (? 1794)
En 1792, après la chute du roi et la fermeture des derniers Couvents, les seize Carmélites de Compiègne occupent des maisons en ville, à Paris.
Puis le 27 Juin 1794, elles sont arrêtées, et jugées le 12 Juillet.
Quand la charrette les emmène, vêtues de leurs robes et de leurs manteaux blancs et chantant des Cantiques, «elles ont l’air d’aller à la noce» dit un témoin.
On rapporte que la foule impressionnée par leur calme et leur dignité, les accueille en silence.
Après le Veni Creator, elles renouvelèrent leurs vœux de Religion. Puis la Prieure, Mère Thérèse de Saint Augustin, au pied de l’échafaud, Bénit chacune des Sœurs et leur donna à embrasser une minuscule statuette de terre cuite cachée au creux de sa main.
La plus jeune, Sœur Constance, est appelée la première ; elle gravit les marches entonnant tout à coup le psaume 117 Laudate Dominum, omnes gentes (Louez Dieu, tous les peuples), repris par ses Sœurs.
On le chante au Carmel depuis le XVIe siècle pour consacrer l’entrée dans la maison de Dieu au moment d’une nouvelle Fondation.
La Consécration par laquelle, vers Pâques 1792, la Communauté s’est offerte «en holocauste pour que la Paix soit rendue à l’Église et à l’État» vient d’être ratifiée par Le Seigneur.
Leurs corps sont jetés dans l’une des fosses communes creusées dans le terrain sablonneux d’un jardin dépendant de l’ancien Couvent de Picpus.
Trois étaient parisiennes de naissance. Les autres sont au calendrier de l’Église de Paris en raison du lieu de leur Martyre. (diocèse de Paris)
- Gertrud von Le Fort: La dernière à l'échafaud - Adaptation de Jean-Dominique Hamel - Lu par Nathalie Hamel "La crainte est quelque chose de plus profond que le courage". Écrite en 1931, cette nouvelle raconte l'histoire des seize Carmélites de Compiègne guillotinées le 17 jJuillet 1794. C'est sur cette nouvelle que Georges Bernanos s’appuiera pour écrire ses "Dialogues de Carmélites"
- Mémoire d'une Carmélite de Compiègne, d'après les mémoires de Sœur Marie de l'Incarnation - Adaptation de Nathalie Hamel - Lu par Nathalie Hamel -
1792, la révolution gronde. Les vœux Monastiques sont supprimés. Au Carmel de Compiègne, les Religieuses doivent se séparer.
Absente de Compiègne lors de l'arrestation de ses Sœurs, Sœur Marie de l'Incarnation sera la seule rescapée de l'exécution des Carmélites de Compiègne à la barrière du Trône renversé (actuellement place des Antilles à la Nation) le 24 Juillet 1794.
Vers 1830, peu de temps avant sa mort, elle écrit ses mémoires qui sont un témoignage unique sur la Terreur.
Carmélites de Compiègne et Martyres. Sous la Révolution française, elles furent condamnées à mort parce qu’elles avaient conservé fidèlement la Vie Religieuse et, avant de monter à l’échafaud, elles renouvelèrent leur profession de Foi Baptismale et leurs vœux Religieux.
Martyrologe romain.
http://nominis.cef.fr/contenus/saint/1522/Bienheureuse-Charlotte.html
Bienheureuse Charlotte
et ses compagnes, Carmélites de Compiègne, Martyres (? 1794)
Anne Marie Madeleine Françoise Thouret, en religion Sœur Charlotte de la Résurrection est née en 1715 à Mouy dans le diocèse de Beauvais.
Lorsqu'éclate la Révolution française, en 1789, la Communauté du Carmel de Compiègne compte 21 Religieuses. 18 monteront sur l'échafaud.
Conformément au décret du 13 Février 1790 qui supprime les Ordres Religieux Contemplatifs, chaque Carmélite est invitée à déclarer si son intention est de sortir de son Monastère.
Toutes affirment "vouloir vivre et mourir dans cette sainte maison."
En 1792, la Mère Prieure leur propose "un acte de Consécration par lequel la Communauté s'offrirait en holocauste pour que la Paix Divine, que Le Fils de Dieu était venu apporter au monde, fut rendue à l'Église et à l'État."
Le 14 Septembre 1792, elles sont expulsées de leur Couvent. Chaque jour, elles prononcent l'acte d'offrande.
Le 23 Juin 1794, au temps de la Grande Terreur, elles sont arrêtées. Jugées et condamnées à mort le 17 Juillet, elles sont guillotinées le soir même, sur la place de Nation à Paris.
Leurs corps furent enterrés au cimetière de Picpus dans une fosse commune, où ils se trouvent encore dans le jardin des Religieuses.
Carmélites de Compiègne.
À Paris, en 1794, les Bienheureuses Thérèse de Saint-Augustin (Marie-Madeleine-Claudine Lidoine) et quinze compagnes: les Bienheureuses Marie-Anne-Françoise Brideau (Sœur Saint-Louis), Marie-Anne Piedcourt (Sœur de Jésus Crucifié), Anne-Marie-Madeleine Thouret (Sœur Charlotte de la Résurrection), Marie-Claudie-Cyprienne Brard (Sœur Euphrasie de l’Immaculée-Conception), Marie-Gabrielle de Croissy (Sœur Henriette de Jésus), Marie-Anne Hanisset (Sœur Thérèse du Cœur de Marie), Marie-Gabrielle Trézelle (Sœur Thérèse de Saint-Ignace), Rose Chrétien de Neufville (Sœur Julie-Louise de Jésus), Annette Pelras (Sœur Marie-Henriette de la Providence), Marie-Geneviève Meunier (Sœur Constance), Angélique Roussel (Sœur Marie du Saint-Esprit), Marie Dufour (Sœur Sainte-Marthe), Élisabeth-Julie Vérolot (Sœur Saint-François), Catherine et Thérèse Soiron (sœurs converses), vierges, Carmélites de Compiègne et martyres.
Sous la Révolution française, elles furent condamnées à mort parce qu’elles avait conservé fidèlement la Vie Religieuse et, avant de monter à l’échafaud, elles renouvelèrent leur profession de Foi Baptismale et leurs vœux Religieux.
Martyrologe romain
"Il est certain que notre position actuelle porte des exceptions qu’un cœur droit peut avouer mais dont un cœur fidèle n’abuse pas."
Lettre de Mère Thérèse prisonnière à l’une de ses Religieuses.
BBses Thérèse de Saint-Augustin et ses compagnes
Carmélites de Compiègne, Martyres
(† 1794)
En 1790, il y avait 21 Sœurs au Carmel de Compiègne dont la plus âgée avait 75 ans et la plus jeune 26 ans.
Chassées de leur Carmel en 1792, elles s'installèrent dans 3 maisons voisines.
Lors d'une perquisition des révolutionnaires, ceux-ci trouvèrent des images du Sacré-Cœur (emblème vendéen et royaliste) ainsi que des lettres destinées à des Prêtres réfractaires.
Arrêtées, elles furent escortées jusqu'à Paris et là, jugées sommairement et guillotinées, sur la Place du Trône (aujourd'hui, Place de la Nation), le 16 Juillet 1794.
En montant sur l'échafaud, elles chantaient le « >>> Veni Creator Spiritus » et la Mère supérieure donna la Bénédiction à chacune avant d'être elle-même guillotinée.
Seule une Sœur en réchappa, absente le jour de l'arrestation, et publia un récit en 1836, basé sur de nombreux témoignages.
http://www.carmel.asso.fr/Les-noms-des-soeurs.html
Noms, dates et lieux de naissances des seize Martyres :
1 - Mère Thérèse de St. Augustin : Madeleine-Claudine Lidoine, 1752, Paris, St Sulpice
2 - Sœur Saint Louis : Marie-Anne-Françoise Brideau, 1751, Belfort
3 - Sœur de Jésus Crucifié : Marie-Amie Piedcourt,1715, Paris, St. Innocents
4 - Sœur Charlotte de la Résurrection : Anne-Marie-Madeleine-Françoise Thouret, 1715, Mouy (Oise)
5 - Sœur Euphrasie de l’Immaculée Conception : Marie-Claude-Cyprienne Brard, 1736, Bourth (Eure)
6 - Mère Henriette de Jésus : Marie-Françoise de Croissy, 1745, Paris, St. Roch
7 - Sœur Thérèse du Cœur de Marie : Marie-Anne Hanisset, 1742, Reims
8 - Sœur Thérèse de St. Ignace : Marie-Gabrielle Trézel, 1743, Compiègne, St. Jacques
9 - Sœur Julie-Louise de Jésus : Rose Crétien de Neuville, 1741, Évreux (Eure)
10 - Sœur Marie-Henriette de la Providence : Anne Pelras, 1760 Cajarc (Lot)
11 - Sœur Constance de Jésus : Marie-Geneviêve Meunier, 1765, St. Denis
12 - Sœur Marie du Saint-Esprit : Angélique Roussel, 1742, Fresne-Mazancourt (Somme)
13 - Sœur Ste Marthe : Marie Dufour, 1741, Bannes (Sarthe)
14 - Sœur St. François-Xavier : Elisabeth-Juliue Verolot, 1764, Lignières (Aube)
15 - Sœur Catherine : Marie-Anne Soiron, 1742, Compiègne, St. Jacques
16 - Sœur Thérèse : Marie-Thérèse Soiron, 1748, Compiègne, St. Jacques
Le seize Martyres de Compiègne furent Béatifiées le 13 Mai 1906 par Saint Pie X (Giuseppe Sarto, 1903-1914).
Reproduction d'une aquarelle peinte par une Carmélite. Illustration extraite de Louis David (o.s.b.), Les Seize Carmélites de Compiègne, [1906].
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bienheureuse_Charlotte
Charlotte de la Résurrection
Anne-Marie-Madeleine-Françoise Thouret, en religion Sœur Charlotte de la Résurrection (Mouy 16 Septembre 1715 - Paris 17 Juillet 1794) est la doyenne des Carmélites de Compiègne qui furent guillotinées à Paris durant la Grande Terreur.
Béatifiée avec ses sœurs carmélites martyr de Compiègne le 27 Mai 1906 par le Pape Saint Pie X, elle est fêtée le 17 Juillet.
Biographie
Enfance et entrée au Carmel
Anne Marie Madeleine Thouret est née le 16 Septembre 1715 à Mouy, dans le diocèse de Beauvais.
Orpheline de père, elle supporta mal le remariage de sa mère ainsi que l'autorité de son beau-père.
Sa jeunesse développa en elle un goût immodéré pour la danse et toute occasion lui était bonne pour se soustraire à sa famille et aller danser.
Elle était une jeune femme recherchée pour sa gaieté qui lui permettait de trouver des alliés prêts à camoufler sa désobéissance filiale.
Nonobstant, un « événement si tragique » à ses dires - dont nous ne savons rien - étant survenu au cours d'un bal, elle se jura de ne plus jamais mettre les pieds dans une salle de bal.
Elle entra au Carmel de Compiègne à l'âge de vingt-et-un ans en 1736 mais les cinq années qui séparent son entrée au Couvent de la prononciation de ses vœux définitifs tendent à prouver que son cheminement spirituel fut ardu. Elle prit alors le nom de Sœur Charlotte de la Résurrection.
Elle occupa les fonctions d'infirmière du Couvent puis de peintre. Elle mit beaucoup de zèle dans ses fonctions au point que sa santé s'en ressentit.
La Révolution
Lorsque la Révolution française éclate en 1789, elle est la doyenne du Carmel de Compiègne (elle est alors âgée de 74 ans) qui compte vingt-et-une Religieuses et doit marcher avec une béquille.
À cause du décret du 13 Février 1790 qui supprime les Ordres Religieux (décret que Sœur Charlotte reçut avec véhémence), chaque Carmélite est invitée à déclarer si son intention est de sortir de son Monastère. Toutes affirment « vouloir vivre et mourir dans cette sainte maison ».
La Consécration pour la France
Un siècle avant la Révolution une Carmélite de ce Monastère, Sœur Élisabeth-Baptiste, avait vu en songe toutes les Religieuses de son Couvent dans la Gloire du Ciel, revêtues de leur manteau blanc et tenant une palme à la main.
L'interrogation quant à l'éventualité d'un Martyr pour les Religieuses de ce Couvent était restée présente tout au long du siècle, jusqu'à l'arrivée de la Révolution et du début des violences.
En Septembre 1792, lorsque la Mère Prieure sent dans la Communauté monter le désir du Martyr, elle propose aux Religieuses, de faire un acte de Consécration par lequel "la Communauté s'offrirait en Holocauste pour apaiser la colère de Dieu et (pour) que cette Divine Paix que son cher Fils était venu apporter au monde fût rendue à l'Église et à l'État".
Cette Consécration est faite d'enthousiasme par toutes les Religieuses, sauf deux, plus anciennes, qui expriment leurs craintes (Sœur Charlotte de la Résurrection faisait elle partie des ces deux Religieuses ?).
Elles sont moins émues par le sacrifice lui-même que de la manière dont il devra s'accomplir (la guillotine).
Mais quelques heures plus tard, en pleurant, elles sollicitent la faveur de prêter à leur tour le serment, et ainsi de se joindre à leurs Sœurs.
Chaque jour, la Communauté renouvelle sa Consécration, et son engagement à mourir pour la France.
Le 14 Septembre 1792, en application de la loi sur les Congrégations Religieuses, elles sont expulsées de leur Couvent.
Elles sont hébergées dans la ville de Compiègne, et vivent réparties en petits groupes dans 4 maisons, étroitement surveillées par la police locale.
Le 23 Juin 1794, elles sont arrêtées puis envoyées à Paris pour être jugées.
Les mains liées dans le dos comme ses Sœurs, ne pouvant se déplacer seule, Sœur Charlotte a du mal à descendre de la charrette.
Elle est si violemment projetée à terre par ses bourreaux qu'on la croit morte, ce qui provoque la colère des témoins.
La ci-devant Sœur Charlotte et ses Sœurs sont jugées sommairement, condamnées et exécutées Place de la Nation le 17 Juillet 1794.
Son corps comme ceux de ses Sœurs est jeté dans une fosse commune du Cimetière de Picpus voisin.
Les Carmélites de Compiègnes
Pour le détail de la vie, du procès et de l'exécution des Carmélites, dont Charlotte de la Résurrection, se reporter à l'article des Carmélites de Compiègne qui traite la vie de toute la Communauté.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Carm%C3%A9lites_de_Compi%C3%A8gne
Carmélites de Compiègne
Les Carmélites de Compiègne sont seize Religieuses Carmélites (cloîtrées) condamnées à mort en Juillet 1794 par le Tribunal révolutionnaire pour motif de « fanatisme et de sédition ».
Arrêtées et condamnées au plus fort de la Terreur, elles avaient, deux ans auparavant, fait le vœu de donner leur vie pour « apaiser la colère de Dieu et que cette Divine Paix que Son cher Fils était venu apporter au monde fût rendue à l'Église et à l'État ».
Leur mort paisible sur l'échafaud impressionnera les foules. Elles ont été Béatifiées en 1906.
Leur vie et leur arrestation ont inspiré plusieurs œuvres (nouvelle, pièce, film, opéra) appelées pour la plupart Dialogues des carmélites.
Histoire du Couvent
La Fondation
L'Ordre du Carmel est réformé en Espagne par Thérèse d'Avila en 1562. Le premier carmel réformé est fondé en France en 1604 par Pierre de Bérulle avec l'aide de Barbe Acarie.
Le Carmel de Compiègne est fondé le 21 Avril 1641. Huit Carmélites viennent prendre solennellement possession de la maison dite de la « Toison d’Or » à Compiègne.
C'est le cinquante-troisième Carmel fondé en France.
Les Carmélites vont déménager plusieurs fois, avant de s'installer définitivement dans le Convent construit pour elles le 23 Mars 1648 et dédié au mystère de l’Annonciation.
Situé à proximité du château royal, il bénéficie jusqu'à la Révolution de la protection des reines de France, d'Anne d'Autriche jusqu'à Marie-Antoinette.
Avant la Révolution, le Carmel compte vingt et un membres, la plupart de bonne famille, mais il ne s'en trouve aucune parmi elles qui fût issue d'une famille royale ou noble.
Au moment où débute la Révolution française, la Prieure est Mère Thérèse de Saint-Augustin.
Le songe de Sœur Élisabeth-Baptiste
À la fin du XVIIème siècle, soit un siècle avant la Révolution, une Carmélite de ce Monastère, Sœur Élisabeth-Baptiste, voit en songe toutes les Religieuses de son Couvent dans la Gloire du Ciel, revêtues de leur manteau blanc et tenant une palme à la main.
L'interrogation quant à l'éventualité d'un Martyre pour les Religieuses de ce Couvent restera présente tout au long du siècle, jusqu'à l'arrivée de la Révolution et du début des violences.
Aussi, en Septembre 1792, lorsque la Mère Prieure sent dans la Communauté monter le désir du Martyre, elle propose aux Religieuses de faire un acte de Consécration par lequel « la Communauté s'offrirait en Holocauste pour apaiser la colère de Dieu et [pour] que cette Divine Paix que Son cher Fils était venu apporter au monde fût rendue à l'Église et à l'État ».
Cette Consécration est faite d'enthousiasme par toutes les Religieuses, sauf deux, plus anciennes, qui expriment leurs craintes.
Elles sont moins émues par le sacrifice lui-même que de la manière dont il devra s'accomplir (la guillotine).
Mais quelques heures plus tard, en pleurant, elles sollicitent la faveur de prêter à leur tour le serment, et ainsi de se joindre à leurs Sœurs.
Et ainsi, chaque jour, toute la Communauté, dans son ensemble – lorsque les Religieuses étaient encore dans leur Carmel –, puis dans les différents groupes – lorsqu'elles ont été expulsées du Couvent –, renouvelait sa Consécration et son engagement à mourir pour la France.
Vie du Couvent durant la Révolution
Les spoliations
Le 02 Novembre 1789, les biens du clergé sont confisqués et remis à la Nation, afin de résoudre la crise financière, premier motif de la convocation des États généraux de 1789, mais les Religieuses peuvent rester provisoirement dans leurs bâtiments.
Le 13 Février 1790, tous les Ordres Monastiques et les Congrégations Religieuses régulières sont dissous.
Les vœux qu'elles ont prononcés lors de leur entrée au Couvent sont déclarés nuls.
L'Assemblée nationale les invite à rentrer chez elles, mais les autorise, si elles le désirent, à rester dans leur couvent, qui est devenu propriété de l'État.
L'État propose de servir une pension aux Religieuses. Les Carmélites de Compiègne ayant déclaré vouloir vivre et mourir dans leur « Sainte Maison », restent en Communauté, et touchent leurs 7 243 livres de pension annuelle légale.
En Décembre 1789, Sœur Constance de Jésus, alors novice au Carmel, se trouve interdite par la loi de prononcer ses vœux (loi du 29 Octobre 1789 de « Suspension des vœux dans les Monastères »).
Elle restera donc novice, accompagnant fidèlement ses Sœurs Carmélites.
Le décret du 08 Octobre 1790 prévoit que « les Religieuses qui préféreraient la vie commune à la liberté devaient nommer entre elles, au scrutin et à la pluralité absolue des suffrages, une supérieure et une économe ».
Mère Thérèse de Saint-Augustin est (ré) élue supérieure, et Mère Henriette de Jésus est élue économe.
Les Congrégations séculières seront dissoutes le 18 Août 1792. La veille, les autorités ont signé le décret expulsant de leurs Couvents toutes les Religieuses qui y étaient encore, les bâtiments devant être vendus pour financer la dépense publique.
La date limite de l'exécution est fixée au 1er Octobre. C'est dans les jours qui suivent que la Communauté Monastique prononce son vœu de martyre.
Le 14 Septembre 1792, jour de la Fête de l’Éxaltation de la Sainte Croix, les Carmélites sont expulsées par les autorités civiles de leur Couvent, et quittent celui-ci, privées de leurs tenues de Religieuses : elles sont « rendues à la vie civile ».
Le serment Liberté-Égalité
La convention impose aux ex-Religieuses, par le décret du 15 Août 1792, de prêter serment devant la nation en déclarant :
« Je jure d'être fidèle à la nation et de maintenir la liberté et l'égalité ou de mourir en la défendant. »
Certaines Religieuses refuseront avec force, et jusqu'à la mort, de prêter ce serment, arguant qu'il est en opposition avec leurs vœux d'obéissance prononcés lors de leur entrée dans les Ordres.
Elles refusent donc de jurer pour ne pas être parjure avec leur propre parole (donnée).
Ce ne sera pas le cas des Carmélites de Compiègne qui, le 19 Septembre 1792, prêteront toutes le serment « Liberté-Égalité » sur les conseils des autorités civiles de la commune, mais sans prêter le serment de la Constitution civile du clergé.
Le Carmel clandestin
Expulsées de leur Couvent le 14 Septembre 1792, elles sont hébergées par quelques familles de Compiègne, et réparties en quatre groupes dans des maisons contiguës près de Saint-Antoine.
Elles s’organisent pour continuer leur Vie de Carmélites : temps de Prière, de travail, etc.
Pendant quelques mois, elles réussissent à assister à la Messe dans l’église Saint-Antoine de Compiègne, en entrant discrètement par la petite porte, du côté est de l’église.
Elles maintiennent une Vie communautaire paisible et discrète. Cinq jours après leur expulsion, elles ont même prêté le serment « Liberté-Égalité » exigé pour les Religieux pensionnés par l'État.
Chaque jour, elles prononcent leur « vœu de Consécration totale à la Volonté Divine », fût-ce au prix de leur vie, pour obtenir la fin des massacres de la Terreur et la Paix pour l'Église et l'État.
Mais à l'automne 1793, dans le cadre de l'action de déchristianisation menée par des agents de la Convention et relayée par les autorités locales, la pratique du culte Catholique devient très difficile à Compiègne, tout comme dans le reste de la France.
Arrestation et jugement
Le contexte
La Terreur règne en France depuis mi-1792, quand les têtes ont commencé à tomber. Le 10 Juin 1794, une nouvelle législation répressive (les « lois de prairial ») est mise en place.
Durant quarante-sept jours – la Terreur prend fin le 28 juillet –, il y aura autant de condamnés à mort que durant les quatorze mois précédents.
Pierre-Gaspard Chaumette, membre actif de la Terreur, dira même, en parlant de la guillotine :
« Montagne sainte, devenez un volcan dont les laves dévorent nos ennemis ! Plus de quartier, plus de Miséricorde aux traîtres ! Jetons entre eux et nous la barrière de l'éternité ! ».
Cette accélération de la Terreur à contre-courant des événements militaires (les armées révolutionnaires remportant victoire sur victoire, aussi bien contre les coalisés européens que contre les « ennemis de l'intérieur ») demeure une énigme historique complexe.
En Mai 1794, la ville de Compiègne était déjà soupçonnée de tiédeur dans sa lutte contre le « fanatisme Religieux ».
L'arrivée de cette nouvelle législation plus sévère a pu pousser les autorités à essayer de « se dédouaner à bon compte ».
D'autant que le Carmel, officiellement fermé, avait été recréé officieusement mais au su de tous.
Un ordre de perquisition est signé le 21 Juin 1794 ; il est promptement exécuté dans les maisons occupées par les Religieuses.
L'arrestation
Les seize Carmélites présentes à Compiègne sont arrêtées les 22 et 23 Juin 1794 et incarcérées à l'ancien Couvent de la Visitation, transformé en prison.
La supérieure, Mère Thérèse de Saint-Augustin, était en déplacement à Paris du 13 au 21 Juin, et revient donc « juste à temps ».
Quelques écrits et objets compromettants – quelques lettres imprudentes et critiquant la Révolution, qui étayeront la thèse d'un prétendu complot royaliste et fanatique –, trouvés lors de la perquisition, justifient leur arrestation.
La Terreur est alors au plus fort et touche notamment les Ordres Religieux. Ainsi à Arras, le 26 Juin, quatre Religieuses des Filles de la Charité sont exécutées et, en Juillet, ce sont trente-deux Religieuses (ursulines, Sacramentaires et Bernardines), ainsi que trente Prêtres qui sont guillotinés.
Le 12 Juillet 1794, les seize Carmélites sont transférées de Compiègne à la Conciergerie à Paris, où elles sont jugées le 17 Juillet en pleine Grande Terreur de messidor an II.
Les Carmélites, juste avant leur transfert, remettent leurs robes blanches de Carmélites, et c'est en tenue de Religieuses qu'elles arrivent à Paris.
En prison
Paradoxalement, c'est leur arrestation et la prison qui permettent aux Carmélites de toutes se retrouver ensemble.
Elles en profitent pour vivre ensemble leur règle de Vie, et chanter leurs Offices. Denis Blot, témoin des faits, a déclaré « qu'on les entendait toutes les nuits, à deux heures du matin, récitant leur Office ».
Le 16 Juillet, elles célèbrent la Fête de Notre Dame du Mont-Carmel avec un grand enthousiasme.
Au dire d'un détenu, ce jour, veille de leur mort, paraissait être un grand jour de Fête.
Le Sacré-Cœur, d'après la vision de Marguerite-Marie Alacoque, XVIIIe siècle. Musée du Cœur (Bruxelles).
Les éléments d'accusation
Des images du Sacré-Cœur sont retrouvées dans leurs maisons, et le tribunal y voit un « caractère de ralliement des rebelles de la Vendée ».
La dévotion au Sacré-Cœur, peu connue en France avant la Révolution, s'est répandue très vite dans les années 1789-1790.
De nombreux prêtres l'ont recommandée.
Elle est devenue très pratiquée dans les Couvents. Il n'est pas étonnant d'avoir trouvé de telles images dans les maisons des Religieuses.
L'accusation de « fanatisme » est liée à la volonté des Religieuses de continuer à vivre leur Foi Catholique, de rester fidèles à leurs vœux d'Obéissance qu'elles ont prononcés lors de leur entrée dans leur Ordre.
Le « fanatisme » a été défini par Voltaire comme une « folie religieuse sombre et cruelle ».
Il est considéré comme un crime si grave qu'il n'est pas nécessaire de faire une loi contre lui.
La Révolution le rejette avec force : c'est le crime par excellence qui trouble la société.
Voltaire écrira : « pour qu'un gouvernement ne soit pas en droit de punir les erreurs des hommes, il est nécessaire que ces erreurs ne soient pas des crimes ; elles ne sont des crimes que quand elles troublent la société ; elles troublent la société dès qu'elles inspirent le fanatisme ; il faut donc que les hommes commencent par n'être pas fanatiques pour mériter la tolérance ».
Le simple fait que les Religieuses soutiennent devant le tribunal leur attachement Religieux est donc, pour le tribunal, une preuve de fanatisme.
Jean-Jacques Rousseau avait écrit en 1762 : « quiconque refusera d'obéir à la volonté générale, y sera contraint par tout le corps ; ce qui signifie autre chose qu'on le forcera d'être libres ».
Pour les esprits « libres » de la Révolution, « la Charité désintéressée n'existe pas ».
Les chefs de la Révolution et les juges du tribunal ne comprennent donc pas que des Religieuses soient prêtes à renoncer à leur liberté et à se soumettre à une règle de vie en Communauté où « elles renoncent à tous leurs biens ».
Cet attachement à leur Foi leur semble suspect. Et, par là, criminel.
C'est pour cela que les Religieuses seront parfois sorties de force de leurs Couvents pour être fouettées publiquement, puis emprisonnées, et même guillotinées.
Le procès
L'acte d'accusation est rédigé par Fouquier-Tinville. Elles sont accusées « d'avoir formé des conciliabules de contre-révolution et d'avoir continué à vivre soumises à leur règle et à leur supérieure » ; elles sont taxées de fanatisme.
Leur correspondant épistolaire, M. Mulot, un homme marié, est qualifié de Prêtre réfractaire.
Un seul témoin est cité, mais ne comparaît pas.
L'acte de condamnation est imprimé avant la tenue du procès, et elles n'ont pas droit à un avocat.
Sœur Marie de l’Incarnation indiquera dans son récit sur la vie des Carmélites que celles-ci ont – en plus – réfuté leur serment liberté-égalité durant leur procès.
Ce point sera repris par différents hagiographes.
Ce point semble être confirmé par des historiens qui indiquent que l'acte d'accusation cite le « refus de prêter serment ».
Toutes sont condamnées à mort et exécutées le jour même comme « fanatiques et séditieuses ».
Exécution des seize Carmélites
Elles sont guillotinées le 29 messidor an II (17 Juillet 1794), à la barrière de Vincennes, sur la place du Trône-Renversé (ancienne place du Trône, dénommée ainsi depuis 1792, actuellement place de la Nation).
Les seize Religieuses, conduites par leur supérieure, Mère Thérèse de Saint-Augustin, quittent la prison vers 18 heures et prennent le chemin de la guillotine en chantant des Cantiques tout au long du parcours (le Miserere, le Salve Regina).
Vêtues de leurs manteaux blancs de Religieuses, elles descendent des charrettes, puis se mettent à genoux et entonnent le Te Deum, prononcent le renouvellement de leurs vœux et chantent le Veni Creator.
À 20 heures, les assistants du bourreau Charles-Henri Sanson viennent chercher la première, qui est aussi la plus jeune, Sœur Constance de Jésus, une novice.
Elle fait une génuflexion devant la Mère supérieure pour lui demander la permission de mourir.
En montant les marches de l'échafaud, elle entonne le Laudate Dominum (psaume chanté lors des Fondations des Carmels, avec la symbolique de fonder au Ciel une nouvelle Communauté).
Les quinze autres Carmélites sont exécutées ensuite.
Sœur Marie Henriette de la Providence, l'infirmière, est l'avant-dernière ; la Mère supérieure, Mère Thérèse de Saint-Augustin, passe en dernier.
Les chants des Religieuses, durant leur parcours jusqu'à la guillotine, puis gravissant l'échafaud, impressionnent fortement la foule qui assiste en silence au transfert des Religieuses et à leur exécution.
« On ne saurait croire l'impression de respect que commandait le dévouement de ces généreuses victimes ; toutes soupiraient après le moment de leur sacrifice, toutes s'exhortaient a rester fermes et généreuses dans le dernier combat... ; elles avaient l'air d'aller à leurs noces. » (Témoignage d'un employé de la prison).
Leurs corps et leurs têtes sont jetés de nuit dans l'une des deux fosses communes du cimetière de Picpus.
Les dépouilles se trouvent encore dans le jardin des Religieuses.
Conclusion
Les Religieuses sont guillotinées le 17 Juillet, et la Terreur prend fin le neuf thermidor an II (28 Juillet 1794), avec l'exécution de Robespierre et de ses compagnons, renversés par une coalition hétéroclite, de droite et de gauche mais tous les comploteurs craignant pour leur sécurité personnelle.
Certains Mystiques virent dans l'arrêt de la Terreur, onze jours après la mort des Carmélites, une réponse positive à la Prière des Religieuses.
Le Monastère est vendu en 1795. Aujourd'hui, il n’en reste rien.
L’emplacement du Monastère est occupé par l’École d’État-major et le Théâtre impérial.
Depuis 1994, une plaque rappelle l'ancienne présence du bâtiment Religieux.
Les rescapées
Sur les vingt et une Carmélites présentes à l'aube de la Révolution, deux vont décéder avant l'année 1791, et trois autres vont partir à Rosières-en-Santerre et à Paris. Elles échappent ainsi involontairement au Martyre collectif.
Les Sœurs Stanislas de la Providence (Legros) et Thérèse de Jésus (Jourdain) partent à Rozières (Somme) chez le frère de Sœur Stanislas en Mars 1794, pour aider celui-ci à la suite du décès de son épouse.
Sœur Thérèse de Jésus décède à Soyecourt en 1830, âgée de quatre-vingt-deux ans. Nous n'avons pas de traces de Sœur Stanislas de la Providence.
Toujours en Mars 1794, Sœur Marie de l’Incarnation se rend à Paris pour la régulation d’une rente sur l’État.
Marie de l'Incarnation va rassembler les documents et archives de la Communauté, rencontrer les Sœurs Bénédictines anglaises de Cambrai, emprisonnées avec les Carmélites et qui figureront parmi les derniers témoins.
Après avoir voyagé en France, elle s'installe au Carmel de Sens en 1823, jusqu'à son décès le 10 Janvier 1836.
C'est elle qui racontera le Martyre de ses compagnes et qui nous laissera le récit de leur histoire.
Béatification et Fête
Le procès en Béatification s'ouvre en 1896. Mgr Roger de Teil est postulateur à la cause des Béatifications.
En septembre 1896, il se rend au Carmel de Lisieux faire une conférence sur les Carmélites de Compiègne qui impressionnera beaucoup Thérèse de Lisieux.
Le 27 Mai 1906, les Carmélites sont Béatifiées par le Pape Saint Pie X en pleine période de séparation de l'Église et de l'État en France, alors qu'à nouveau les biens de l'Église sont saisis par l'État, et les Congrégations Religieuses expulsées de France.
Leur Fête est célébrée le 17 Juillet. Dans l'Ordre du Carmel, celle-ci est célébrée avec rang de mémoire.
Plaque en mémoire des seize Carmélites de Compiègne au cimetière de Picpus.
Photo de Mu.
Noms des seize Carmélites
L'âge moyen des condamnées est de quarante-neuf ans. La liste des Carmélites est la suivante :
- Sœur Constance de Jésus (29 ans, novice), née Marie-Geneviève Meunier le 28 mai 1765 à Saint-Denis,
- Sœur Saint Louis (42 ans, sous-prieure), née Marie-Anne-Françoise Brideau le 7 décembre 1751 à Belfort,
- Sœur Euphrasie de l’Immaculée Conception (58 ans, choriste), née Marie Claude Cyprienne Brard le 12 mai 1736 à Bourth (Eure),
- Sœur Julie-Louise de Jésus (53 ans, choriste), née Rose Chrétien de Neuville le 30 décembre 1741 à Évreux (Eure),
- Sœur Sainte Marthe (51 ans, converse), née Marie Dufour le 2 octobre 1741 à Bannes (Sarthe),
- Sœur de Jésus Crucifié (78 ans, choriste jubilaire) née Marie-Anne Piedcourt le 9 décembre 1715 à Paris, Saints-Innocents,
- Sœur Marie du Saint Esprit (52 ans, sœur converse), née Angélique Roussel le 3 août 1742 à Fresne-Mazancourt (Somme),
- Sœur Saint François-Xavier (33 ans, sœur converse), née Juliette Verolot le 13 janvier 1764 à Lignières (Aube),
- Sœur Thérèse de Saint Ignace (51 ans, choriste), née Marie-Gabrielle Trézel le 4 avril 1743 à Compiègne, Saint-Jacques,
- Sœur Charlotte de la Résurrection (78 ans, choriste jubilaire), née Anne-Marie-Madeleine-Françoise Thouret le 16 septembre 1715 à Mouy (Oise),
- Sœur Thérèse du Cœur de Marie (52 ans, choriste), née Marie-Anne Hanisset le 18 janvier 1742 à Reims
- Sœur Catherine (52 ans, tourière) – non une religieuse mais « femme gagée » –, née Catherine Soiron le 2 février 1742 à Compiègne, Saint-Jacques,
- Sœur Thérèse (49 ans, tourière) – même statut que sa sœur Catherine –, née Marie-Thérèse Soiron le 23 janvier 1748 à Compiègne, Saint-Jacques,
- Mère Henriette de Jésus (49 ans, maîtresse des novices), née Marie Françoise Gabrielle Colbert de Croissy le 18 juin 1745 à Paris, Saint-Roch,
- Sœur Marie-Henriette de la Providence (30 ans, choriste), née Marie-Anne Pelras le 16 juin 1760 à Cajarc (Lot)
- Mère Thérèse de Saint-Augustin (41 ans, Prieure), née Marie-Madeleine-Claudine Lidoine le 22 septembre 1752 à Paris, Saint-Sulpice.
Le retour des Carmélites à Compiègne
La restauration
À partir de 1835, les Carmélites tentent de refonder un Couvent à Compiègne sous l’impulsion de la Mère Camille de Soyecourt du Carmel de la rue de Vaugirard à Paris (actuellement à Créteil) et de l’Abbé Auger, curé de la paroisse Saint-Antoine.
La Reine Marie-Amélie donne son appui. Mais la Révolution de 1848 disperse les Sœurs qui regagnent leurs Carmels d’origine.
Le 18 Janvier 1867, Mère Marie-Thérèse de l’Enfant-Jésus (Marie Daignez) conduit quelques Religieuses du Carmel de Troyes, qui s’installent officiellement, mais provisoirement, dans une maison rue Saint-Lazare, à la périphérie de la ville.
La construction d'un Monastère est entreprise en 1872 et prend fin avec l’inauguration de la chapelle en 1888.
L'afflux de postulantes permet à Mère Marie des Anges (Olympe Anner) de fonder le Carmel de Beauvais en 1892.
En 1894, la célébration du centenaire du martyre des Carmélites de Compiègne trouve un large écho dans l’opinion publique et les Carmels de France.
À Lisieux, Sœur Thérèse de l’Enfant-Jésus confectionne un oriflamme destiné à la décoration de la chapelle du Carmel de Compiègne. En 1896 s’ouvre le procès de Béatification, qui aboutit le 27 Mai 1906.
L'expulsion des communautés religieuses en 1906 pousse la Communauté de Compiègne à partir à Statte en Belgique, où elles fondent un nouveau Carmel sous la conduite de Mère Marie de Saint-Joseph (Célina Wattecamps).
Au cours du XXème siècle, plusieurs Sœurs provenant du Carmel de Compiègne vont fonder d’autres Carmels (Betafo à Madagascar, l’actuel Carmel de Tananarive, Saint-Sever dans les Landes, Mangalore et Shembaganur en Inde).
À la fin des années 1920, quand la situation se débloque entre l'État et l'Église, les Ordres Religieux reviennent et les Carmélites réintègrent leur Monastère de Compiègne.
En 1992, les Carmélites décident de vendre le Monastère et d'en construire un nouveau à Jonquières, à 10 kilomètres à l’ouest de Compiègne.
Elles conservent, dans la crypte de l’église, les souvenirs qu'elles ont pu recueillir des Carmélites martyres.
Les reliques
Les vêtements civils portés par les Carmélites après leur expulsion du Carmel et durant leur emprisonnement ont été recueillis par des Religieuses anglaises, emprisonnées en même temps que les Carmélites.
Expulsées de France après de longs mois d'emprisonnement, elles sont retournées en Angleterre en ramenant précieusement ces dernières reliques des Carmélites, les corps et vêtements Religieux de ces dernières ayant été jetés dans la fosse commune.
Elles ont par la suite expédié ces reliques à différents Carmels dans le monde.
Citations
Chanson composée par Sœur Julie-Louise, le jour de Notre Dame du Mont-Carmel, à la Conciergerie sur l’air de La Marseillaise :
« Livrons nos cœurs à l'allégresse,
Le jour de gloire est arrivé.
Loin de nous la moindre faiblesse.
Le glaive sanglant est levé ! [bis]
Préparons-nous à la victoire
Sous les drapeaux d'un Dieu mourant ;
Que chacun marche en conquérant ;
Courons tous, volons à la gloire !
Ranimons notre ardeur :
Nos corps sont au Seigneur.
Montons, montons
À l'échafaud, et Dieu sera vainqueur. ».
http://www.carmel.asso.fr/-Carmelites-de-Compiegne-.html.
Les Seize Bienheureuses Carmélites de Compiègne
Béatifiées par le Pape Saint Pie X le 27 Mai 1906.
Les seize Carmélites de Compiègne ont « rendu leur beau témoignage » à Paris sur la place de la Nation, le 17 Juillet 1794.
Comme Martyres, elles incarnent la vocation Chrétienne et la suite du Christ dans sa radicalité.
Comme communauté, elles sont une expression lumineuse du « petit collège du Christ » tel que le concevait Thérèse d’Avila : rassemblées « dans la dépendance de Jésus-Christ », « méditant jour et nuit la Parole du Seigneur et veillant dans la prière » avec Marie, Mère de Jésus, « fidèles à la communion fraternelle » et « se prévenant d’égards mutuels ».
C’est dans cette fidélité très quotidienne qu’a pu résonner avec la plus grande force l’appel apostolique de Sainte Thérèse.
A l’automne 1792 elles étaient expulsées de leur Monastère et faisaient ensemble un acte d’offrande d’elles-mêmes pour que la paix soit rendue à l’Église et à l’État.
Arrêtées à Compiègne en Juin 1794, et transférées à Paris le 13 Juillet, c’est librement, sans ostentation ni exaltation, qu’elles donnèrent leur vie.
Leur chant limpide en gravissant les marches de l’échafaud était bien l’expression de leur Amour de Jésus.
La foule qui était là ne s’y est pas trompée, elle a été saisie par le mystère.
Aujourd’hui, en cette fin de XXe siècle, Thérèse de Compiègne et ses sœurs ne nous pressent-elles pas, à la suite de Teresa d’Avila : « Le monde est en feu ! »
« Ne dormez plus, ne dormez plus, tant qu’il n’y a pas de paix sur la terre ! »
Au Rwanda et en Algérie, au Congo et au Soudan, aux Philippines et en Inde, d’autres sont affrontés à la violence aveugle et choisissent d’y répondre par l’Amour…
Les martyres de Compiègne à la guillotine. Dessin de 1907.
http://christroi.over-blog.com/article-33903964.html.
En 1790, il y avait 21 Soeurs au Carmel de Compiègne dont la plus âgée avait 75 ans et la plus jeune 26 ans.
Chassées de leur Carmel en 1792, elles s'installèrent dans 3 maisons voisines.
Lors d'une perquisition des révolutionnaires, ceux-ci trouvèrent des images du Sacré-Coeur (emblème vendéen et royaliste) ainsi que des lettres destinées à des Prêtres réfractaires. Arrêtées, elles furent escortées jusqu'à Paris et là, jugées sommairement et guillotinées sur la Place du Trône (aujourd'hui, Place de la Nation).
Arrivée à Paris la brutalité s'abat sur Soeur Charlotte ; infirme, âgée, les mains ligotées derrière le dos depuis le début du voyage, harassée par ce trajet sous un soleil ardent, ballottée dans une mauvaise charrette, elle ne sait descendre. Deux sans-culottes montent alors dans la charrette et la projettent brutalement sur le pavé. Son visage est en sang. Elle se relève péniblement, sans une plainte, remerciant même ses bourreaux de ne pas l'avoir tuée, préférant s'offrir en Martyre.
Le cachot où elle est jetée est répugnant et comble car chaque jour les exécutions laissent la place libre pour les nouveaux arrivants mais dans sa bonté, elle prodigue soins et courage à chacun et chacune. Elle suit plus que jamais la Règle, récite tous les Offices et prie.
Le 17 Juillet 1794, l'affaire, jugée grave, est portée devant le Tribunal révolutionnaire de Paris présidé ce jour-là par leur concitoyen Scellier, le frère du maire de Compiègne. (Mis en jugement le 28 Mars 1795, ce dernier sera condamné à son tour le 6 Mai et exécuté le lendemain, en même temps que Fouquier-Tinville !)
Le citoyen Fouquet-Tinville tient le siège d'accusateur. Après un semblant de procès factice et rapide, la condamnation est prononcée. Moins d'une heure après la levée de l'audience la sentence sera exécutée sur la place de la Nation pour le seul motif de "machiner contre la République".
Lorsque les exécuteurs l’aident à monter les marches de l’échafaud, Sœur Charlotte ne peut s’empêcher de leur dire d’une voix douce : « Mes amis, je vous pardonne de tout mon cœur ».
En montant sur l'échafaud, les Religieuses chantaient le Veni Creator et la Mère supérieure donna la Bénédiction à chacune avant d'être elle-même guillotinée. Seule une Soeur en réchappa, absente le jour de l'arrestation, et publia un récit en 1836, basé sur de nombreux témoignages. Elles furent Béatifiées en 1905 par Pie X.
Ces morts tragiques ont alimenté au XXième siècle toute une œuvre tant littéraire avec la pièce de Georges Bernanos appelée « le dialogue des Carmélites », cinématographique avec le film du même nom du Père Bruckberger, que musicale avec l’opéra de Francis Poulenc ou artistique avec Molineri peignant en 1906 un tableau appelé « les Carmélites montant à l’échafaud » et qui se trouve au Carmel de Compiègne.
http://missel.free.fr/Sanctoral/07/17.php.
Les 16 Bienheureuses Carmélites de Compiègne.
Le 4 Août 1790, les membres du directoire du district se présentèrent au Monastère des Carmélites de Compiègne, conformément aux ordres donnés par la Constituante, et procédèrent à l'inventaire des biens de la Communauté.
Les Religieuses furent invitées à quitter leur habit et à abandonner leur Monastère. Cinq jours plus tard, sur les conseils de la municipalité, elles signèrent toutes le serment de Liberté-Égalité.
Dès lors, elles vécurent dispersées en quatre petits groupes, mais continuant, sous le costume séculier, leur existence de Prière et d'immolation.
Le songe de Sœur Elisabeth Baptiste
Un siècle auparavant, une Carmélite de ce Monastère, Sœur Élisabeth-Baptiste, avait vu en songe toutes les religieuses de son Couvent dans la Gloire du Ciel, revêtues de leur manteau blanc et tenant une palme à la main... Le Ciel leur réservait-il donc l'honneur du Martyre ? Cette pensée se présentait fréquemment à leur esprit.
Aussi la Mère Prieure, sentant le désir qui prenait corps dans la Communauté, leur proposa-t-elle, au cours de l'année 1792, de faire un acte de Consécration par lequel la Communauté s'offrirait en holocauste pour apaiser la colère de Dieu et (pour) que cette Divine Paix que Son cher Fils était venu apporter au monde fût rendue à l'Église et à l'État. Cette Consécration fut faite d'enthousiasme.
Deux Religieuses anciennes, qui, tout d'abord, n'avaient pu dissimuler la crainte que leur causait l'idée de la guillotine et qui avaient hésité, émues moins du sacrifice lui-même que de la manière dont il devait s'accomplir, sollicitèrent, quelques heures plus tard et en pleurant, la faveur de se joindre à leurs Sœurs.
Et, chaque jour, en Communauté d'abord, dans les différents groupes ensuite, la Consécration était renouvelée, maintenant une flamme qui ne devait s'éteindre qu'au jour de la suprême immolation, sous le couperet de la guillotine.
Arrestation des Carmélites
Cependant la régularité même de la vie de chaque groupe, reproduisant aussi exactement que le permettaient les circonstances l'horaire de la vie conventuelle, n'avait pas échappé aux Jacobins de Compiègne.
Ils dénoncèrent donc au comité de salut public du district les ci-devant Carmélites comme existant toujours en communauté, se livrant à des réunions suspectes et entretenant avec les fanatiques de Paris une correspondance criminelle.
Le 22 Juin 1794, elles furent enfermées au Monastère de la Visitation, transformé alors en prison. Là, en attendant que le Comité de salut public, avisé par le comité local, statuât sur leur sort, les recluses rétractèrent leur serment de Liberté-Égalité, préférant mille fois mourir plutôt que de rester coupables d'un tel serment.
Le transfert à Paris
Le 12 Juillet, parvenait à Compiègne l'ordre du Comité de salut public de les transférer à Paris. Escorté de deux gendarmes et de neuf dragons, le cortège prit la direction de Paris, et parvint le lendemain, vers trois heures de l'après-midi, à la Conciergerie.
Malgré leurs liens et leur extrême fatigue, les Carmélites mirent pied à terre sans l'aide de personnes. Seule, une Religieuse octogénaire et infirme, Sœur Charlotte de la Résurrection, les membres engourdis par une longue immobilité, ne savait comment descendre de la charrette. Impatientés, les voituriers la saisirent et la jetèrent brutalement sur le pavé.
Elle se releva tout en sang et se contenta de dire à ceux qui venaient de la traiter ainsi :
Croyez bien que je ne vous en veux pas. Je vous ai au contraire bien de la reconnaissance de ce que vous ne m'avez pas tuée, parce que si je fusse morte... J'aurais été ravie au bonheur et à la gloire du Martyre.
C'était l'une des deux Religieuses qui, deux ans auparavant, avaient hésité devant la perspective d'une mort sanglante ; maintenant, elle acceptait généreusement son sacrifice.
A la Conciergerie comme à Compiègne, les seize Carmélites continuèrent à observer leur Règle : un témoin digne de Foi, Denis Blot, élargi le 9 thermidor, déclare qu'on les entendait toutes les nuits, à deux heures du matin, récitant leur office.
Le 16 Juillet, elles célébrèrent la Fête de Notre-Dame du Mont-Carmel avec un tel enthousiasme qu'au dire d'un détenu la veille de leur mort paraissait un grand jour de Fête pour elles.
Le soir elles reçurent avis de leur comparution, le lendemain, devant le Tribunal révolutionnaire.
La mort sur l'échafaud
Après un bref interrogatoire et sans même entendre de témoins, le tribunal condamnait à mort les seize Carmélites coupables de former des rassemblements et des conciliabules contre-révolutionnaires, d'entretenir des correspondances fanatiques et de conserver des écrits liberticides.
Et comme sans s'émouvoir, l'une d'elles, Sœur Henriette de la Providence, demandait au président Scellier ce qu'il fallait entendre par le mot de fanatique qui figurait dans le texte du jugement, elle reçut cet aveu qui devait les remplir d'une joie indicible :
J'entends par là votre attachement à ces croyances puériles, vos sottes pratiques de religion.
Une heure après, elles montaient dans les charrettes qui, par la place de la Bastille, les conduisirent sur la place du Trône renversé (place de la Nation). Tandis qu'à leur passage une foule assez composite manifeste des sentiments divers, allant des cris et des injures jusqu'à l'admiration, elles, indifférentes et sereines, chantent le Miserere puis le Salve Regina.
Arrivées au pied de l'échafaud, elles entonnent le Te Deum, le cantique de l'action de grâce qu'elles font suivre du Veni Creator. Après quoi, elles renouvellent leurs promesses de Baptême et leurs vœux de Religion.
Mais voici qu'une jeune novice, Sœur Constance, s'agenouille devant la Prieure. Avec autant de simplicité que derrière les murs du Couvent, elle lui demande sa Bénédiction et la permission de mourir, puis, chantant le psaume Laudate Dominum, omnes gentes, elle gravit les marches de l'échafaud.
L'une après l'autre, les autres Religieuses observent le même cérémonial et viennent recevoir la Bénédiction de Mère Thérèse de Saint-Augustin avant de cueillir la palme du martyre. Enfin, la dernière, après avoir vu toutes ses filles donner à Dieu la plus grande preuve d'Amour que puisse, ici-bas, lui donner la créature, la Prieure livre, elle aussi, sa tête au bourreau.
Vie des Saint et Bienheureux,
Bénédictins de la rue de la Source, éd. Letouzey
Leur histoire a paru suffisamment riche de sens à des artistes de ce siècle pour qu'ils y trouvent la matière de plusieurs œuvres qui ont toutes été des événements marquants de la vie culturelle jusqu'à ces dernières années.
La nouvelle de Gertrud von le Fort, intitulée La dernière à l'échafaud, donne à Georges Bernanos le désir de voir réaliser un film dont il écrit le scénario. Il meurt en 1948 avant d'en voir la réalisation.
La version cinématographique, intitulée Dialogue des Carmélites, dans un texte adapté par le P. Bruckberger, est réalisée en 1960 par Philippe Agostini. Deux comédiennes célèbres interprétaient les rôles principaux : Jeanne Moreau et Madeleine Renaud.
Une version pour la scène est dirigée en 1961 par Marcelle Tassencourt.
Auparavant un opéra en trois actes de Francis Poulenc avait été créé en italien à la Scala de Milan et en français à l'Opéra de Paris (1957).
Plus près de nous, en 1987, une version intégrale était présentée pour la première fois dans une mise en scène de Gildas Bourdet, à Lille d'abord où le metteur en scène dirigeait un théâtre national décentralisé, puis à Paris au Théâtre de la Porte Saint-Martin sous l'égide de la Comédie Française.
Les deux personnages retenus par les différents auteurs, une jeune Religieuse. Blanche de la Force, et la Mère Supérieure, sont unies par un lien spirituel qui permet une sorte d'échange Mystique entre celle qui tremblait de peur, Blanche, et celle qui poussait ses filles au martyre, la Supérieure. Après avoir assisté sa Supérieure dans une douloureuse agonie, c'est Blanche, la timorée, qui monte la dernière à l'échafaud... en chantant un psaume.
Dialogues des Carmélites de Compiègne par Georges Bernanos.
Les Dialogues des Carmélites que publient les Cahiers du Rhône (Éditions du Seuil) sont la dernière œuvre de Georges Bernanos ; il les écrivit en Afrique du Nord durant l'hiver 1947-1948 et en traça les lignes finales le jour même où il s'alita pour ne plus se relever. Ces dialogues lui avaient été commandés pour un film dont le R.P. Raymond Bruckberger avait écrit le scénario d'après la célèbre nouvelle de Gertrud von Le Fort, La Dernière à l'échafaud. Mais Bernanos, retrouvant dans ce canevas les thèmes qui avaient dominé toute sa Vie spirituelle - l'enfance, la peur, la sainte agonie - en fit une œuvre qui n'appartient qu'à lui.
C'est l'histoire des seize Carmélites de Compiègne qui furent guillotinées à Paris le 17 Juillet 1794 et montèrent sur l'échafaud en chant le Veni Creator.
Gertrud von Le Fort, s'inspirant librement des sources historiques, a imaginé le personnage de la petite novice, Blanche de la Force, qui est l'héroïne des Dialogues. C'est une jeune fille peureuse, dont la mère est morte en couches, à la suite de la frayeur qu'elle a eue, prise dans la foule en panique lors d'un accident survenu Place Louis-XV, en 1774. A quinze ans, Blanche décide d'entrer en Religion, après avoir à son tour été isolée dans une foule en émeute, en Avril 1789.
Elle se présente à la Prieure du Carmel de Compiègne, Mme de Croissy (c'est la scène que nous reproduisons), et par une sorte de divination, choisit de s'appeler en religion Sœur Blanche de l'Agonie du Christ.
Elle connaîtra bientôt le sens de ce nom qui convient à sa vocation personnelle. elle assiste d'abord à la terrible agonie de la Prieure qui, ayant deviné l'âme timorée de Blanche, la confie à Mère Marie de l'Incarnation.
Cependant, les événements révolutionnaires se déroulent et on procède à l'inventaire des Couvents, en attendant des mesures plus graves. Pourtant, Sœur Blanche, malgré la peur qui l'habite, refuse de rentrer dans sa famille.
Un décret de la République interdit de prononcer des vœux Monastiques. Mère Marie voudrait qu'on admît Blanche à prononcer les siens, mais la nouvelle Prieure, Mme Lidoine, femme courageuse mais prudente et d'un bon sens un peu terre à terre, s'y oppose.
Devant la menace grandissante, Mère Marie et la plupart des Carmélites voudraient prononcer un vœu de Martyre. Cette fois encore, la Prieure use de son autorité et les dissuade d'un geste qui lui paraît prématuré.
Mais en son absence et aussitôt après le pillage du Couvent, Mère Marie prend sur elle de faire prononcer ce vœu. Alors que toutes s'attendaient à voir Blanche s'y soustraire, elle prend l'engagement de s'offrir au Martyre. C'en est trop pourtant : aussitôt après elle s'évade.
Mère Marie part à sa recherche. Blanche, dont le père a été exécuté, vit comme absente d'elle-même, prisonnière d'une bande de sans-culottes qui l'exhibent comme la victime, libérée par eux, de la tyrannie des Prêtres.
Lorsque Mère Marie la retrouve, on sait que les Carmélites viennent d'être condamnées à mort, Blanche refuse de les rejoindre et s'enfuit encore. Mais elle se trouve Place de la Révolution lorsque ses Sœurs montent à l'échafaud et, au moment où la dernière voix chantant le Veni Creator s'éteind, la voix de Blanche reprend l'hymne et l'enfant peureuse s'offre à la guillotine. Seule survivra Mère Marie à qui l'aumônier du Carmel arrache un ultime sacrifice : le sacrifice de sa volonté de Martyre.
Ainsi s'accomplit le mystère de la peur, transfigurée par son identification à l'angoisse du Crucifié. Comme l'indique le nom de Blanche, ce mystère est celui de l'imitation de la Sainte-Agonie. Bernanos l'avait dit déjà, il y a longtemps, dans une page de La Joie où l'abbé Chevance disait : En un sens la Peur est tout de même la fille, de Dieu, rachetée la nuit du Vendredi Saint... Ne vous y trompez pas, elle est au chevet de chaque agonie, elle intercède pour l'homme.
Albert Béguin.
Ouvrir aujourd'hui le dossier des Carmélites de Compiègne à l'occasion de la reprise de Dialogues des Carmélites conduit paradoxalement l'historien à s'interroger sur ces fonctions : certifier, expliquer, comprendre.
Oui, effectivement seize Carmélites arrêtées à Compiègne et transférées à Paris furent bien jugées par le tribunal révolutionnaire, condamnées et exécutées le jour même, 17 juillet 1794, dix jours avant la chute de Robespierre.
La Communauté comprenait deux tourières et une novice de 29 ans. Le grand âge des plus vieilles (79 ans) ne les sauva point de la mort. Une seule échappa, parce qu'absente de Compiègne.
Elle devint la première historienne de cette tragédie. Oui encore, la Prieure, à l'été 1792, suggéra à sa Communauté de faire acte de Consécration par lequel elle s'offrirait en holocauste pour apaiser la colère de Dieu, ce qui causa quelques troubles ; oui enfin, à l'ultime moment, celle-ci obtint de monter la dernière à l'échafaud pour encourager et Bénir ses filles une à une.
Le reste est littérature, mais quelle littérature ! Ajoutons que les Carmélites furent reconnues martyres, Béatifiées en 1906, au moment même où Pie X condamnait véhémentement la séparation de l'Église et de l'État.
Expliquer, ensuite. Le sang a coulé sous la Révolution et souvent celui d'innocents, mais l'exécution d'une Communauté entière de Religieuses, si l'on met à part la Vendée, est un fait heureusement exceptionnel.
Plusieurs phénomènes semble-t-il conjuguent ici leurs effets. D'abord, indéniablement, la nouvelle législation répressive du 10 Juin 1794. Début alors la Grande Terreur : en quarante-sept jours, le tribunal révolutionnaire de Paris prononcera plus de condamnations à mort que durant les quatorze mois précédents.
En second lieu le contexte local. La ville de Compiègne, en mai, est soupçonnée de tiédeur dans sa lutte contre le fanatisme. En arrêtant un moi plus tard les carmélites que l'on savait regroupées en plusieurs maisons, les autorités se dédouanaient à bon compte. Enfin peut-être, comme en bien d'autres cas, l'imprudence des intéressées. Les perquisitions permirent de saisir des pièces jugées compromettantes.
Se souvint-on de plus que le Carmel de Compiègne avait des liens privilégiés avec la famille royale, même si la majorité des Moniales était d'origine plutôt modeste ? C'est fort possible.
Comprendre enfin. Il faudrait pour cela abandonner un temps nos Carmélites pour mieux restituer la mentalité révolutionnaire, vivre leur drame partagé par d'autres. Trois dossiers seraient particulièrement éclairants.
Celui de la déchristianisation d'abord, telle qu'elle a été vécue, sur place, dans la région de Compiègne ; immédiate, dès Octobre-Novembre 1792, violente avec abdication forcée des Prêtres et fermeture des églises, mais aussi mal acceptée des populations, rarement dramatique, à l'exception justement de l'exécution des Carmélites.
Celui de l'attitude devant la mort ensuite. La lecture des dernières lettres que les condamnées ont envoyées à leurs familles montre que la sérénité et le courage étaient largement partagés, mais aussi, l'espérance de se trouver bientôt, sans crainte, devant l'Être suprême dans un face-à-face confiant, mais sans médiateur, sans Christ et sans Prêtre, le plus souvent.
Celui enfin de la guillotine qui nous révèle bien des choses sur l'imaginaire de la Terreur. Les exécutions, ces messes rouges, exerçaient incontestablement une étrange fascination sur les foules.
Pourtant quel romancier aurait osé parler ainsi de la guillotine.
Écoutons Chaumette, le déchristianisateur parisien : Montagne sainte, devenez un volcan dont les laves dévorent nos ennemis ! Plus de quartier, plus de miséricorde aux traîtres ! Jetons entre eux et nous la barrière de l'éternité ! L'histoire parfois a de ces audaces...
Claude Langlois.
Date de dernière mise à jour : 17/07/2024
Commentaires
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1 GUY CHASSE Le 17/07/2018
Merci, Pierre Parrot, de cette merveilleuse présentation. Ces Carmélites devraient être canonisées.
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